Startups cyber : investissons pour voir émerger nos futures licornes

Depuis 2019, la cybersécurité occupe le devant de la scène médiatique française : les cyberattaques sont devenues quotidiennes. Elles touchent aussi bien les grandes entreprises, que les PME, sans épargner les collectivités territoriales et les institutions d’utilité publique telles que les hôpitaux. Avec des levées de fonds records et de nombreuses initiatives publiques, les écosystèmes cyber en France et en Europe connaissent une dynamique nouvelle, c’est le moment d’investir et de contribuer au développement de startups pour voir apparaître les licornes de demain.

Le marché de la cybersécurité français est en phase de croissance : il commence à se densifier, avec 164 startups, dont 34 créées cette année, et 32 scale-ups, en plus des grands groupes qui ont une activité en lien avec la cybersécurité.
Le gouvernement français mise beaucoup sur cette filière, avec la mise en place de plusieurs plans d’investissement :

• Le Grand Défi Cyber en 2019 pour contribuer à la R&D et aux technologies de rupture en cybersécurité, doté de 30M€ était le premier programme public spécifiquement destiné à ce secteur,
• La stratégie nationale cyber mise en place en 2021 comprenant 720 millions d’euros de financement public pour répondre à la hausse des cyber menaces, incluant 136 millions d’euros, plus tard réhaussés à 176M€ confiés à l’ANSSI dans le cadre du plan France Relance en 2022,
• 2022 marque aussi l’ouverture du Campus Cyber.

Les investissements privés sont aussi à la hausse, certes grâce au rebond d’activité post-Covid, mais pas seulement.

En 2019, le premier programme d’investissement cyber, le Grand Défi Cyber, est mis en place. Son but ? Financer des projets R&D de PME de la filière cyber, notamment sur l’automatisation de la cybersécurité. Cependant, à l’époque, le venture capital paraît moins mûr, surtout en comparaison avec Israël ou les États-Unis : un manque de maturité de l’économie cyber et un engouement encore en deçà pour l’entrepreneuriat sont des freins majeurs pour les investisseurs.
Pourtant, les premières startups cyber qui ont effectué leurs séries A, tels qu’Alsid, Sqreen, Sentryo, se sont faites racheter par des grandes entreprises américaines pour une coquette somme d’argent. Les startups cyber françaises sont donc innovantes et attractives.
L’écosystème cyber français a réussi à bien structurer sa base, malgré la rareté du financement, ce qui n’est pas une mauvaise nouvelle en soi.

Des levées de fonds se réalisent plus facilement et peuvent avoisiner les 50 millions d’euros, des startups ont la capacité de se transformer en grand nom de la filière sans se faire racheter (Tehtris, Sekoia.io…). La structuration de l’écosystème français va grandement changer d’ici 2030, aidé par les actions de l’Etat, notamment par le programme Cyber Booster pour stimuler la création et la croissance de projets de startups cyber. C’est le moment propice pour les fonds d’investissement de penser aux jeunes et moins jeunes entreprises cyber qui lèvent des fonds.
Car la filière cyber a le vent en poupe, et cela va continuer : le sentiment de retard face à Israël devient moindre.
Les prochaines étapes ? Pour structurer un écosystème de financement spécialisé capable d’adresser des levées de fonds de 100 millions d’euros et plus, le nombre de startups arrivant à ce stade de maturité devra nécessairement être relativement élevé. Une vision européenne de la filière cyber est donc indispensable pour permettre d’élargir le champ des possibles et d’être compétitif avec les Etats-Unis, qui reste le premier pays, avec Israël, en termes d’innovation et de startups.

Le domaine de la cybersécurité est certes une filière numérique, mais avec une dimension très technique. En conséquence, le cycle d’innovation est très court, et les innovations et technologies de rupture viennent très souvent des startups. Malgré de gros efforts de la part des acteurs publics, le monde de la recherche et celui de l’industrie de la cyber manquent encore de continuité. Sur le modèle israélien où les grands comptes se tournent vers les startups pour sourcer l’innovation, les grands groupes français doivent davantage faire confiance aux solutions proposées par les startups.
Les startups cyber sont indispensables pour que la France reste compétitive et innovante sur le marché du numérique et de la cybersécurité

Plusieurs évolutions sont à prévoir. D’un côté, le nombre de création de startups cyber va continuer à augmenter rapidement avec lui, le besoin en financement early stage. De l’autre, le marché français devrait se consolider, et permettre de faire émerger les futurs géants de la cybersécurité en Europe, car les startups qui font des gros tours aujourd’hui vont en racheter d’autres pour se développer.
Chez les investisseurs, il ne serait pas étonnant de voir de gros fonds d’investissement rentrer sur des tours plus early stage, la compétition devenant relativement rude sur les tours suivants.

La structuration du marché européen est une étape indispensable pour en faire une alternative crédible au marché américain. Les différentes initiatives passées ou en cours (NIS2, Cyber Resilience Act, Cybersecurity Act…) sont prometteuses pour permettre à nos startups de se développer rapidement et de lever des fonds de manière ambitieuse auprès d’acteurs européens.

William Lecat, directeur d’investissements, Auriga Cyber Ventures

Poursuivez votre lecture avec nos différents articles sur les sujets du moment en cybersécurité.